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Clémentine Martin
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10 juin 2020
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Aux Etats-Unis, Reformation et Refinery29 dans la tourmente après des accusations de racisme

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Clémentine Martin
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10 juin 2020

La flambée de protestations que connaissent actuellement les États-Unis est comparée par certains à un nouveau mouvement des droits civils. Les employés noirs et de couleur s’insurgent contre le racisme toléré, voire encouragé par certaines entreprises sur le lieu de travail.


Instagram @reformation


Reformation pointé du doigt par d'anciens salariés



La griffe favorite des it-girls a déjà été accusée de "grossophobie" (discrimination envers les personnes en surpoids) par le passé. Mais aujourd’hui, une ancienne employée accuse la marque de promouvoir une culture d’entreprise encourageant le racisme. Elle Santiago a ainsi témoigné sur Instagram des discriminations qu’elle a selon elle subies, en raison de sa couleur de peau. Elle affirme notamment s’être vue refuser à plusieurs reprises une promotion, et prétend que cette politique s’étend à toute l’entreprise, qui favoriserait la progression hiérarchique des personnes blanches. Certaines personnes de couleur assument pourtant des responsabilités correspondant à des postes plus qualifiés que le leur, d’après les déclarations de la jeune femme.

"Encore aujourd’hui, certains de vos employés de couleur assument d’importantes responsabilités qui ne sont pas reflétées dans l’intitulé de leur poste", s’insurge Elle Santiago. Elle Santiago a par ailleurs spécifiquement mentionné la fondatrice de Réformation Yael Aflalo. "Quand j’ai rencontré Yael pour la première fois, j’étais enchantée à l’idée de me présenter comme assistante de direction de son flagship. Elle m’a regardée de la tête aux pieds et a tourné les talons avec un air dégoûté." "Sa mentalité imprègne toutes les équipes de direction chez Ref [Reformation]. Cela explique pourquoi les personnes de couleur ont toujours été traitées de cette façon."

Elle Santiago a quitté son poste en décembre 2016 et fait part de son expérience à "une personne de la direction au siège de [Reformation]", mais aucune mesure n’a apparemment été prise suite à son témoignage. En revanche, les accusations de la jeune femme ont été relayées par Diet Prada, un compte Instagram très influent qui prétend exposer au grand jour les travers de l’industrie. Suite à cela, Yael Aflalo a présenté des excuses publiques sur le compte Instagram de Réformation. "J’ai échoué", commence le communiqué. "Le respect de l’environnement et des personnes implique de mettre tout le monde sur un pied d’égalité. Je réalise maintenant que j’ai échoué à le faire dans ma propre entreprise, et que j’ai particulièrement affecté la communauté noire." "Malheureusement, l’approche de la diversité que nous adoptions jusqu’à maintenant était guidée par notre 'vision de blancs', ce qui confine à l’ignorance… Je suis furieuse contre moi et aurais souhaité m’en rendre compte plus tôt."

Yael Aflalo a également déclaré "ne pas être une très bonne directrice". Selon elle, les actions qui lui sont reprochées n’ont pas été dictées par "une discrimination basée sur la couleur de la peau" mais par "ses défauts personnels dans la façon de traiter les autres". Afin d’en finir avec ces débordements sur le lieu de travail, la dirigeante va soumettre son entreprise à une enquête indépendante et créer un "conseil de la diversité et de l’inclusion" afin d’améliorer la culture d’entreprise. Enfin, Yael Aflalo elle-même va mettre la main au portefeuille, avec un don de 500 000 dollars que se partageront le fonds NAACP pour la protection légale et institutionnelle, le fonds Thurgod Marshall College et le National Black Child Development Institute.

La cofondatrice et rédactrice en chef de Refinery29 annonce son départ



Mais Reformation n’est pas la seule entreprise a être ébranlée par ce tremblement de terre. Lundi, la cofondatrice et rédactrice en chef de Refinery29, Christene Barberich, a annoncé son départ. Les rumeurs faisant état d’une culture toxique au sein du média ne faisant que croître depuis quelques jours.

L’entreprise Refinery29 a notamment été interpellée sur Twitter et accusée de discriminer ses employés noirs en leur versant des salaires inférieurs. Par ailleurs, presque aucune femme noire n’occuperait de poste de direction au sein de l’entreprise, et les micro-agressions faites aux employés de couleur seraient apparemment tolérées. De nombreux ex-journalistes de Refinery29 ont partagé leurs expériences négatives sur Twitter, dont Andrea González-Ramírez, qui affirme que pour le même poste, ses deux collègues blancs gagnaient 15 000 dollars de plus qu’elle. Andrea González-Ramírez pointe aussi du doigt des comportements irrespectueux plus insidieux envers les personnes de couleur au sein de l’entreprise. Selon les déclarations de la journaliste, il arriverait que d’autres s’approprient leur travail, que les femmes de couleur soient confondues entre elles et que des salaires inférieurs leur soient versés, entre autres.

Dans son communiqué de départ, Christene Barberich a affirmé avoir lu et compris les accusations formulées par les femmes noires et de couleur concernant leurs expériences chez Refinery29. "Je vais quitter mon poste chez R29 [Refinery29] pour laisser plus de place à la diversité à la rédaction en chef et pour permettre à cette marque et aux personnes auxquelles elle s’adresse de commencer un nouveau chapitre décisif."

Refinery29 a aussi publié un communiqué sur son Instagram. "Nous sommes et avons toujours été une entreprise et une marque engagés envers la responsabilité, donnant une voix aux personnes sous-représentées", affirme le site. "Nous sommes tous prêts à nous mettre au travail pour tracer le chemin vers le changement."

Mais le communiqué n’a apparemment pas eu l’effet escompté. "Qu’est-ce que c’est que cette plaisanterie de communiqué ?" s’insurge Phoebe Robinson, comédienne et cocréatrice de 2 Dope Queens. "Une espèce de salade de mots. Bien contente de ne plus rien avoir à voir avec vous depuis des années."

Dans ce contexte certains mouvements prennent plus de sens. L'édition américaine du média Harper's Bazaar a annoncé la nomination de Samira Nasr en tant que rédactrice en chef. L'ancienne "executive fashion director" de Vanity Fair est la première femme de couleur à occuper ce poste.

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