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10 déc. 2019
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Leherpeur dévoile son "petit manuel bienveillant du Made in France"

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10 déc. 2019

Le bureau de conseil Martine Leherpeur a présenté le 2 décembre à Paris son "Petit manuel bienveillant du made in France". L'occasion d'un échange entre professionnels (Le Slip Français, 1083, French Deal, Mode in Town, Black Hat, Le Sac du Berger), à propos des défis à relever pour pérenniser aussi bien ce renouveau du savoir-faire local que l'engouement public qui lui fait écho.


Steeven Kodjia (French Deal), Guillaume Gibault (Le Slip Français) et Steves Hounkponou (Blackhats) - MG/FNW



Le document d'une centaine de pages entreprend de faire le tour des "idées non reçues" concernant le Made in France. L'occasion d'aborder aussi bien la place du "Made in" dans l'ADN de marque, le prix, ou bien sûr le facteur humain. Autant de points s'appuyant sur de nombreux représentants du secteur, comme Pierre Pernod (Cotélac), Marie-Emmanuelle Demoures (Balzac), Sylvain Flet (Le Minor), Laurent Vandebor (Mode Grand Ouest), Anne-Fleur Broudehoux (Roseanna), Olivier Fabre (Maison Fabre), ou encore Clarisse Reille (Le Defi) et Karine Leclercq-Margraff (Maison du Savoir-faire).

L'un des principaux éléments relevé à juste titre par Leherpeur est la constitution progressive d'écosystèmes autour de la mode fabriquée en France. Une volonté de constituer ou reconstituer des verticales 100 % françaises qui s'illustre ainsi par le projet Tricolor entourant les spécialistes de la laine, ou encore par le projet Linpossible sur le front du lin, et mené par le 1083, Splice et le Slip Français.

Ce qui n'empêche pas les acteurs du made in France eux-mêmes d'appeler à une certaine prudence. "Certains de nos fournisseurs voudraient ne travailler que pour nous, mais nous sommes pour qu'ils s'émancipent, ne mettent pas tous leurs œufs dans le même panier", explique Thomas Huriez, fondateur de 1083, qui a récemment publié un ouvrage sur son aventure industrielle, et pour qui la mise en valeur des métiers est essentielle. "Il faut ré-enchanter les métiers du textile comme l'ont fait les cuisiniers. Apporter aux salles de fabrication le même soin qu'aux bureaux. Et ne plus remplacer le mot ouvrier par "opérateur", comme s'il s'agissait de robot".

Un point sur lequel abonde notamment Jean-Pierre Romiguier, créateur de la marque Le Sac du Berger, qui précise cependant ne pas regarder vers les jeunes générations. "Notre espoir, ce sont les personnes de 35-40 ans qui se réorientent, plutôt que de former durant sept ans des jeunes qui auront envie peut être d'autre chose et partiront", explique le dirigeant, pour qui le made in France a peut-être trop regardé du côté du marketing. "On se retrouve entouré de grands communicateurs qui prennent à leur compte le travail mené. Mais, ce qui leur manquent, c'est ce rattachement à un territoire".

"Après sept ans à faire connaître la marque, si nous voulons grandir, il faut aller vers un parti-pris plus mode", explique d'ailleurs Guillaume Gibault qui, avec Le Slip Français, est devenu la tête d'affiche de la mode Made in France. "Nous sommes arrivés au terme d'un premier cycle en termes de développement. Nous avons fait toutes les blagues possibles sur le "slip". Mais, dans la durée, c'est bien sur le produit que tout va se jouer. Il va donc falloir trouver une approche sans doute plus créative".

Ce que ne pourrait que confirmer Steeven Kodjia, fondateur de la marque masculine French Deal. "Ce que je vois parmi nos visiteurs, c'est que le Made in France est une notion qui passe après le reste : les gens sont avant tout en quête de style, de la pièce rare", explique le créateur, qui introduit l'idée du métissage dans le made in France. "Enfant, à l'école c'était la France, et à la maison c'était l'Afrique", explique le créateur, qui entend par son travail créer un pont entre ces cultures.


Thomas Huriez (1083), Jean-Pierre Romiguier (Le Sac du Berger) et Pascal Gautrand (Made in Town) - MG/FNW



"Nous, nos parents viennent de l'étranger. Ce qui nous amène à nous approprier ces valeurs made in France", confirme Steves Hounkponou, fondateur de Blackhats Paris, qui conseille les marques en image et communication communautaire. "Si ma communauté adhère aux valeurs du made in France, je suis ce que ma communauté me dit", pour le spécialiste, qui explique avoir toujours cherché à faire de son handicap une force. Situation qui en un sens se reflète dans l'industrie textile made in France.

Pour Pascal Gautrand, fondateur de Made in Town et instigateur de l'initiative Tricolor : "la question de la fabrication locale permet de faire réémerger du sens". Pour le spécialiste, le secteur paye l'hyperspécialisation des savoir-faire liés aux différentes étapes de production. "Ce qui fait qu'il est difficile pour un seul acteur d'animer toute une filière", pour l'expert. "D'où tout l'intérêt des professionnels d'identifier leurs valeurs communes. Et de recréer des liens".

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