Publié le
12 juin 2021
Temps de lecture
3 minutes
Télécharger
Télécharger l'article
Imprimer
Taille du texte

Ouïghours: Amnesty International apporte un nouvel éclairage sur les persécutions

Publié le
12 juin 2021

Emprisonnement de masse, torture, persécutions, le traitement infligé par la Chine aux Ouïghours et d'autres minorités musulmanes constitue des crimes contre l'humanité, conclut un rapport d'Amnesty international publié jeudi, le plus complet de l'organisation de défense des droits humains.


Le rapport s'accompagne de nombreux illustrations tirées des différents témoignages cités - Amnesty International


"Les autorités chinoises ont créé un paysage d'enfer dystopique à une échelle stupéfiante dans la région autonome Ouïghoure du Xinjiang", a déclaré dans un communiqué Agnès Callamard, secrétaire générale d'Amnesty international. "Ouïghours, Kazakhs et autres minorités musulmanes sont confrontés à des crimes contre l'humanité et à d'autres graves violations des droits humains qui menacent d'effacer leurs identités religieuse et culturelle", a-t-elle ajouté.

Dans un rapport de 160 pages (dont existe un condensé de 18 pages en français), l'ONG a dévoilé des dizaines de nouveaux témoignages d'anciens détenus détaillant les "mesures extrêmes prises par les autorités chinoises depuis 2017 pour déraciner traditions religieuses, pratiques culturelles et langues locales" des minorités musulmanes de la région.

Le rapport détaille les incarcérations de masses depuis 2017, qui se chiffreraient en centaines de milliers, auxquelles s'ajoutent les internements dans des camps, qui atteindraient le million. Avec souvent à la clef l'exploitation par l'industrie manufacturière locale. Ce qui avait poussé nombre de marques d'habillement à couper tous liens avec leurs fournisseurs locaux, s'attirant les foudres de Pékin au travers d'appel au boycott sur les réseaux, et de retrait de marques sur les plateformes chinoises de ventes. Posant un dilemme morale et économique à nombre de marques touchées par la crise sanitaire, ainsi qu'à des labels comme Better Cotton Initiative.

Les témoignages recueillis évoquent l'éducation forcée infligée dans ces camps, pour contraindre les victimes à désavouer l'islam et abandonner dialecte et pratiques culturelles, et à apprendre le mandarin et la propagande du parti communiste chinois.
Tous les anciens détenus interrogés par l'ONG racontent torture et mauvais traitements, coups, privations de sommeil et de nourriture, électrocution. Amnesty évoque la mort d'un détenu resté attaché pendant 72 heures sur une chaise spéciale, devant ses codétenus.


Le rapport aborde la question du contrôle des domiciles des Ouïghours, lors desquels la découverte de signes religieux serviraient à justifier les arrestations - Amesty International/MollyCrabapple



"Le gouvernement chinois a déployé des efforts extraordinaires pour dissimuler ses violations du droit international relatif aux droits humains dans le Xinjiang", estime Amnesty, dont la secrétaire générale a appelé au démantèlement "immédiat" des camps et à la mise sur pied d'une enquête des Nations unies.

Les États-Unis ont qualifié de "génocide" le traitement infligé par Pékin aux Ouïghours, qualificatif que Londres s'est refusé à employer. Selon des experts étrangers, plus d'un million de Ouïghours, principal groupe ethnique du Xinjiang, sont détenus dans des camps de rééducation et certains sont soumis à du "travail forcé".

Les deux rapports qui ont attiré l'attention internationale



Pékin conteste et affirme qu'il s'agit de centres de formation professionnelle destinés à les éloigner du terrorisme et du séparatisme, après de nombreux attentats meurtriers commis contre des civils par des Ouïghours.
 
Ce rapport vient s'ajouter à deux autres documents qui ont largement contribué à attirer l'attention de la communauté internationale. Début 2020, l'Institut australien de stratégie politique (ASPI) publiait le rapport Uyghurs for Sale, qui pointait le recours aux Ouïghours chez des sous-traitants opérant pour quelque 83 marques internationales. Document de 56 pages soulignant que le problème ne se limite pas au Xinjiang, dont la communauté serait envoyée à "s'intégrer par le travail" dans les usines d'autres provinces chinoises. Rendant d'autant plus délicat l'évaluation du poids des Ouïghours dans la production textile.


Image satellite d'un camp d'internement le 24 juin 2018, dans le comté de Karamay au Xinjiang - Amnesty International



Fin 2020, c'est un rapport du Newlines Institute for Strategy and Policy qui enfonçait le clou, relevant que l'implication de la filière textile mondiale était plus vaste qu'initialement annoncée. Ce document se penche ainsi plus largement sur le coton, dont la Chine représente 23% de la production mondiale. Dont 20% concentré dans la région du Xinjiang, où la mécanisation des récoltes serait bien moins répandue qu'annoncée par Pékin.

 (avec AFP)

Tous droits de reproduction et de représentation réservés.
© 2024 FashionNetwork.com