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23 sept. 2015
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Roseanna accueille Bpifrance à son capital

Publié le
23 sept. 2015

Comme annoncé dans FashionMag Premium ce mercredi, Roseanna, la marque française de prêt-à-porter, lingerie, chaussant et accessoire, fait entrer Bpifrance à son capital. Minoritaire, cette participation doit permettre toutefois à la griffe française de franchir un nouveau cap avec l’ouverture prochaine d’une première boutique.

Anne-Fleur Broudehoux, qui a créé la marque en 2007 avec Roxane Thiery, fait le point dans FashionMag.com sur les projets en cours et les raisons du succès de la marque qui est déjà présente dans 135 points de vente à travers le monde et affiche pour 2015 une croissance à deux chiffres.

Anne-Fleur Broudehoux (à gauche) et Roxane Thiery, les fondatrices de la marque Roseanna.

FashionMag.com : Le fonds d’investissement Mode & Finance 2, géré par Bpifrance, et qui est récemment entré chez Lemaire,  vient de prendre une participation minoritaire dans votre société. Quels sont les projets que vous souhaitez développer grâce à cet apport de fonds ?
 
Anne-Fleur Broudehoux : Depuis plusieurs mois, nous avions en tête d’ouvrir un flagship store à Paris, c’est un projet que nous allons pouvoir concrétiser. Actuellement, nous recherchons activement un emplacement, dans l’idéal d’au moins 80 m², du côté de Saint-Germain-des-Prés, du Haut-Marais ou du quartier Saint-Honoré. Nous souhaiterions ouvrir la boutique en début d’année afin de présenter la collection printemps-été 2016, mais nous sommes tributaires du marché immobilier.

FM : D’autres ouvertures sont-elles prévues ?
 
AFB : Oui, mais pas dans l’immédiat car ces projets sont conditionnés par l’ouverture de la première boutique. Concrètement, si notre flagship store est un succès, comme nous l’espérons, nous ouvrirons une deuxième boutique à Paris d’ici un à trois ans car notre objectif est d’être présent en propre rive gauche et rive droite. Une fois ce cap majeur franchi, nous attaquerons le développement retail à l’international avec l’ouverture d’une boutique en propre aux Etats-Unis et une au Japon, deux marchés qui, depuis nos débuts, nous soutiennent.
 
FM : Après sept années de développement via le wholesale, pourquoi vous lancer dans le retail ?
 
AFB : Le développement du retail répond à une double envie : d’une part prendre directement la parole et d’autre part offrir un véritable écrin à nos collections. Une boutique permet d’asseoir la notoriété, mais aussi d’exprimer un univers de marque comme on l’entend, ce qui n’est pas possible en multimarques. En outre, posséder une belle vitrine permet également de développer des projets à l’international car cela offre une vraie crédibilité.
 
FM : Pourquoi avoir attendu aussi longtemps alors que depuis plusieurs saisons la croissance est au rendez-vous ?
 
AFB : Depuis nos débuts, nous avons fait le choix avec Roxane Thiery de prendre notre temps. Nous pensons que, pour ouvrir une boutique, il faut être fort dans tous les sens du terme : produits, identité, structurellement. Nous comprenons que d’autres optent pour un développement via le retail, mais de notre côté, nous avons préféré gagner des forces via le wholesale. Aujourd’hui, nous pensons que c’est le bon moment car nous avons des collections en phase avec le retail, une offre complète (PAP, lingerie, accessoires) et une identité de marque bien définie. Autant d’aspects qui nous permettront de faire vivre une boutique.
 
FM : Vous avez fait de la richesse de votre offre un atout, est-ce que vous prévoyez de développer d’autres lignes ?
 
AFB : Dans l’immédiat, l’objectif est de renforcer nos collections d’accessoires. Le prêt-à-porter et la lingerie sont des segments qui existent par eux-mêmes, ils ne sont pas dépendants l’un de l’autre. Ce n’est pas encore le cas pour l’accessoire et nous souhaitons que cela change. Aujourd’hui, notre offre est dédiée à 15 % à la lingerie et au maillot de bain, 70 % au prêt-à-porter et 15 % à l’accessoire. A moyen terme, nous voulons qu’il représente 20 % à 25 % de nos collections car, étant moins segmentant que le prêt-à-porter, il peut nous permettre d’élargir notre clientèle et donc générer de la croissance. Nous souhaitons également développer nos collections en lançant deux nouvelles lignes : une plus accessible et l’autre plus luxe.  Ce n’est encore qu’un projet mais, a priori, la première aura vocation à élargir notre cœur de collection via des petites pièces comme les t-shirts, mais aussi par le biais de lignes plus activewear et sport chic. Quant à la seconde, elle nous permettra de monter encore en gamme puisqu’il s’agira probablement d’une ligne soir proposant un vestiaire dédié aux cérémonies et aux cocktails.
 
FM : Depuis le lancement de la marque, vous avez opté pour une fabrication française. Depuis, de nombreuses autres marques se sont lancées sur ce credo. A contrario, la course aux prix bas n’a jamais été aussi intense. Comment vous positionnez-vous dans ce marché toujours plus complexe ? 
 
AFB : Nous continuons à fabriquer 90 % de nos pièces en France et nous estimons que c’est toujours un plus, en France comme à l’international. Concrètement, même si à l’origine c’était un simple parti pris, aujourd’hui, il est difficile pour une marque haut de gamme de justifier des prix conséquents si elle n’affiche pas, a minima, une fabrication européenne. Les clientes, certainement en raison des médias, sont devenues très regardantes quant à l’origine de fabrication des pièces. Elles sont agacées si elle ne correspond pas à leur attente. Je ne dis pas qu’une fabrication hors Union européenne est rédhibitoire pour les acheteuses, mais récemment il me semble que c’est devenu un moins.
 
Ceci dit, il faut également savoir écouter le marché. Pour notre part, nous allons continuer à fabriquer la majorité de nos collections en France, mais pour les petites pièces d’entrée de gamme, nous allons commencer à fabriquer en Europe (par exemple au Portugal). Ce n’est pas par plaisir mais, sur ce type de produits, nous ne sommes pas compétitifs et les clientes ne comprennent pas pourquoi. Elles sont prêtes à dépenser plus pour du made in France sur les grosses pièces, mais pas sur des choses basiques. Nous les avons entendues et nous nous adaptons.
 
FM : Quelles sont selon vous les clés du succès pour une jeune marque de prêt-à-porter ?
 
AFB : La première chose selon moi est de s’amuser dans ce que l’on fait. Cela peut paraître simpliste, mais c’est essentiel car, surtout dans la mode, il ne faut pas se contenter de faire de jolies choses, cela ne suffit plus… Il faut surprendre les clientes, les embarquer dans un univers qu’elles n’auraient pas imaginé. Pour arriver à faire cela, il faut travailler avec envie et avoir une passion sans faille. L’autre aspect important pour moi, si on opte pour un développement wholesale, est de savoir être patient. Il ne s’agit pas de s’endormir, mais d’attendre le bon moment pour se lancer sur un marché, de trouver le bon agent et le partenaire adapté pour la distribution. Ce dernier est d’autant plus important que c’est lui qui vend et fait vivre l’univers de la marque... Se précipiter pour être présent rapidement dans beaucoup de points de vente alors qu’ils ne sont pas adaptés est un faux gain de temps. L’image de la marque en sera altérée et les gens n’oublient pas. Il est plus facile de prendre son temps que de tenter de réparer une erreur de stratégie.

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