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Sybille Bald (Lycra) : "Les marques doivent passer par la mode pour parler bas et collants"

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23 oct. 2018

Les 18 et 19 octobre derniers à Côme en Italie, le colloque biennal du marché des bas et collants Lycra Fiber Moves rassemblait plus de 200 responsables de marques et spécialistes du secteur de la bonneterie (lire notre compte-rendu des rencontres). A cette occasion, Sybille Bald, responsable internationale du legwear du groupe Invista, a appelé les marques actives sur ce marché à plus d'audace créative afin de séduire une nouvelle génération de consommatrices.


Sybille Bald s'exprimant lors du Lycra Fiber Moves 2018 - Lycra


FashionNetwork.com : Pourquoi appeler les marques à s'inspirer davantage des tendances dans leur offre de bas et collants ?

Sybille Bald : Il y a une différence entre une tendance de mode et une méga tendance.Une méga tendance, c’est par exemple l'engouement croissant autour des questions de santé et de bien-être dans le textile. Ces tendances changent durablement nos comportements et nos choix de consommation. Nous restons influencés par celles-ci pendant parfois 15 à 20 ans. En revanche, une tendance de mode, c’est ce que nous voyons dans les défilés saisonniers à Paris ou Milan. Et certaines de ces tendances finiront par être visibles dans les rues. Il faut savoir en tirer parti. Quand vous voyez sur les podiums quelque chose de créatif, il faut savoir l’utiliser pour amener le consommateur à vous. Les millennials, si vous ne faites pas cet effort, n’essaieront même pas vos produits. Il y a un grand nombre d’usages audacieux des bas et collants sur les derniers défilés. Donc les marques doivent jouer la carte mode pour parler de bonneterie. Si vous ne suivez pas les tendances, ils penseront que c’est ‘cheap’. Soyez mode et vous deviendrez crédible pour le consommateur.

FNW : Vous trouvez les marques trop timides sur ce point ?

SB : On entend parler depuis des années du déclin du marché de la bonneterie. Je pense effectivement que les marques doivent retrouver confiance en elles. Les bas et collants sont souvent achetés via une offre commerciale du type "deux pour le prix d’un". Il suffit d’aller dans n’importe quelle grande surface. Voilà le plus gros challenge : les marques de bas et collants sont trop focalisées sur la course au prix, au détriment de l’audace de proposer quelque chose de différent. C’est un peu à l’image de notre société : l’écart se creuse entre ceux qui sont en haut et en bas de la pyramide, au détriment de l’intermédiaire. Il y a trop peu d’offres accessibles en dehors de l’entrée de gamme. Or l’enjeu est d’attirer de nouveaux clients, et en particulier les millennials. Mais il faut une offre satisfaisante pour cela. Car vous n’aurez qu’une seule chance, ou éventuellement deux. Pas plus. Si vous n’avez pas un produit de qualité, créatif et dans des prix restant accessibles, vous ne fidéliserez pas.

FNW : Vous parlez d’audace, mais le noir représente toujours la moitié des ventes…

SB : Effectivement, la moitié des ventes portent sur des bas et collants noirs. Si vous regardez trois études menées en 2011, 2014 et 2016, où il a été demandé à des femmes ce qu’elles ont porté le mois précédent, le minimum était de 50 % portant du noir, le maximum s'élevant à 66 %. Regardez autour de vous ce que portent les gens, cela se vérifie facilement. Je pense que la prédominance du noir est amenée à perdurer car c’est un essentiel installé de longue date dans la panoplie des femmes occidentales.

FNW : Ce n’est pas le cas partout dans le monde ?

SB : Non. En Asie, la situation est très différente. Les femmes asiatiques aiment évidemment les bas et collants noirs, mais elles adorent aussi porter leur propre nuance de peau. Et elles veulent au passage se protéger de tout, et notamment des UV. Si vous voulez vendre de la bonneterie en Asie, vous ne pouvez pas échapper à une phase d’étude de marché. Car leur idéal de beauté est différent du nôtre. Rien qu’entre la France et l’Allemagne, cet idéal change. Alors en Asie, imaginez ! Localement, quand on interroge les femmes à propos des produits sculptants, elles ne désirent pas la même chose que les consommatrices occidentales. Par exemple, là où une Occidentale veut un collant qui affine sa taille et ses mollets, une asiatique veut une compression sous le mollet et sous les fesses pour les faire remonter. Et ce n’est qu’un exemple. Il y a moult attentes qui, faute d’être étudiées, ne permettront pas de percer sur ce marché.

FNW : Y a-t-il d’autres zones où les attentes sont très spécifiques ?

SB : Je ne saurais dire. Je doute que les Nord-Américaines soient si éloignées que cela des Européennes sur ce point. Par contre, en ce qui concerne les femmes d’Amérique latine, il y a relativement peu de bas et collants qui sont portés. Le marché de la bonneterie travaille énormément sur l’idée de donner confiance aux femmes. Nous avons mené des études en Amérique du Sud qui montrent que les Brésiliennes et les Argentines sont de manière générale très confiantes en elles. De fait, les bas et collants répondent d’abord à un côté pratique ou tendance. Ce qui est très loin de l’utilisation massive que l’on peut voir au Japon, en Chine ou en Corée du Sud.
 

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