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30 août 2013
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Espace Kiliwatch: l'heure des bouleversements

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30 août 2013

Ce n’est certes pas un tsunami. Mais c’est quand même une bonne tempête qui a frappé cet été un des lieux phares de la rue Etienne Marcel et au-delà du retail mode à Paris. En clair, Eric Talon, célèbre responsable et acheteur de l’espace Kiliwatch à l’entrée de la rue Tiquetonne, a quitté le magasin qu’il pilote depuis l’ouverture début 1996. Une séparation d'un commun accord entre celui-ci et le propriétaire de la boutique Bernard Graf, à la tête par ailleurs d’Eureka Fripes (Kiliwatch, Kiloshop, Hippy Market...) etc. Dixit officiellement les deux amis de longue date.

Eric Talon était présent depuis l'ouverture.


Ce départ est celui d’un homme qui a incarné le concept depuis sa création jusqu’à maintenant tant il a donné sa marque à la partie vêtements neufs notamment en ayant fait de l’Espace Kiliwatch, sur ses 650 m² (plus un sous-sol de 250 m² non exploité) un des grands spots de mode jeune à Paris. Bien avant que Citadium, côté boulevard Haussmann, ne s’implante.

Espace Kiliwatch alliait en effet durant toutes ces années le style vintage porté par la fripe et les marques mode que recherchait la clientèle jeune en quête de produits peu diffusés ou même exclusifs. Effet réussi, d’autant plus que la rue Etienne Marcel était elle-même un spot de mode de premier plan en pleine mutation avec dans ses débuts des griffes de créateurs puis l’arrivée des jeanneurs comme Replay et Diesel.

Photo Pixel Formula


Et puis l’étoile a pâli sous le coup de la concurrence de nouveaux quartiers, comme le Marais qui lui-même s’allonge vers le Haut-Marais, Citadium donc et peut-être une certaine lassitude d’un point de vente dont la conception a peu bougé.

Selon Bernard Graf, le point de vente a totalisé sur l’exercice 2011/2012 quelque 5,8 millions d’euros de chiffre d’affaires. Les bilans déposés de la société K-One font état d’un chiffre d’affaires de 4,98 millions sur l’exercice clos à fin mars 2012. En progression, encore, de 1,3 % sur l’exercice précédent. La différence entre le chiffre annoncé par Bernard Graf et les comptes déposés vient sans nul doute du chiffre d’affaires chaussures, un stand piloté sous forme de concession par le spécialiste Mood et qui n’intègre donc pas le chiffre d’affaires de K-One. Le résultat net lui-même était passé sur les mêmes exercices de 316 400 euros à 405 800 euros !

Toutefois, Bernard Graf admet une dégradation sur le dernier exercice, clos à fin mars dernier. Il évoque une baisse des ventes de 4 %. Dans la rue Etienne Marcel, sont plutôt évoquées des baisses entre 15 et 20 % comme étant des références acceptables du fait de la crise notamment et de la désaffectation d’une clientèle gagnée par d’autres quartiers.

Photo Pixel Formula


Le départ d’Eric Talon est en tout cas pour Bernard Graf l’occasion de repenser le concept. Pour cela il a fait appel à un spécialiste bien connu du métier, et qu’il connaît lui-même très bien puisqu’il s’agit de Philippe Bouloux, le patron de la marque Teddy Smith et des magasins Blue Box.

Bernard Graf et Philippe Bouloux sont en effet associés à 50-50 dans la marque Kiliwatch. Et le groupe de Philippe Bouloux en détient d’ailleurs la licence. Ce dernier a pris en charge les achats et supervise avec Bernard Graf la marche du magasin. Les deux s’appuient sur Alex Voisin, l’adjoint d’Eric Talon, qui encadre l’équipe de vente depuis quasiment toujours et pilote le merchandising.

Tant Bernard Graf que Philippe Bouloux annoncent rechercher aussi un nouveau responsable qui puisse piloter ce gros navire et s’intéresser aussi aux achats.

Mais, surtout, au-delà des personnes, c’est le concept lui-même qui va évoluer. Par exemple, la partie vêtements neufs de l’assortiment était jusqu’à présent pilotée sous forme de dépôt-vente. Philippe Bouloux a décidé de procéder désormais via des achats fermes. "En dépôt-vente, il y a des tas de marques que nous ne pouvons pas avoir et que l’espace Kiliwatch doit référencer", souligne-t-il.

Celui-ci vise en disant cela des marques plus institutionnelles que l’offre actuelle et à plus forte notoriété … Et, évidemment, à même de générer plus de cash. Il cite comme exemple Diesel, Ralph Lauren Denim & Supply, Guess Premium, Hilfiger, Timberland, etc. Certaines de ces marques sont d’ailleurs présentes chez Blue Box. Et il n’a pas peur de référencer des marques exploitant des boutiques monomarques du voisinage comme Diesel. "Hubert Blanc (ndlr directeur général de Diesel France) est ok", souligne-t-il.

Pour autant, Philippe Bouloux n’entend pas faire de cet espace du cœur de Paris un Blue Box bis. "Attention, il ne faut pas que Kiliwatch abandonne les petites marques ou les séries limitées. Il faut trouver un juste équilibre entre les différents secteurs", explique-t-il.

L’exemple du secteur chaussure est éloquent. Philippe Bouloux entend continuer à accueillir cette espace sous forme de concession avec Mood. "Je vends des chaussures chez Blue Box mais des marques évidentes. Je ne suis pas assez fort sur ce marché pour déceler le modèle qui va marcher. C’est un métier".

L’espace Kiliwatch va gagner aussi, dès la droite de l’entrée, un shop-in-shop consacré aux produits de la marque Kiliwatch. D’ailleurs, le magasin va perdre une partie de son nom pour s’appeler tout simplement Kiliwatch…. Exit donc la référence à un espace. "Une nouvelle enseigne est commandée", souligne Philippe Bouloux.

Celui-ci insiste enfin sur d’autres changements comme la mise en place de réassorts, qui n’existaient pas, sur l’organisation plus rationnelle des espaces, sur l’accueil et le service consacré aux clients…

L’implication de Philippe Bouloux pourrait d’ailleurs aller plus loin. Même si rien n’est décidé aujourd’hui, il est possible qu’il s’associe à Bernard Graf dans ce point de vente. D’autant plus qu’ils ont d’autres projets pour en ouvrir ensemble !

Jean-Paul Leroy (avec Bruno Joly)

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